La colonne d'eau

Qu’est-ce que la colonne d’eau ?

La colonne d’eau est un concept utilisé en océanographie permettant de décrire les caractéristiques physiques (température, salinité, pénétration de la lumière) et chimiques (pH, teneur en oxygène dissous, sels nutritifs, métaux traces…) de l’eau de mer à différentes profondeurs pour un point géographique donné.

La colonne d’eau s’étend de la surface jusqu’au fond des océans et peut atteindre jusqu’à 11 km d’épaisseur (la fosse des Mariannes dans le Pacifique). Ce sont les caractéristiques physiques et chimiques de la colonne d’eau qui déterminent la distribution des organismes vivants dans les océans. En surface, la lumière du soleil est disponible et permet donc la photosynthèse alors qu’en profondeur, il fait plus sombre et plus froid (2°C à très grande profondeur). Seuls les organismes capables de résister à l’augmentation de la pression de la colonne d’eau (1 bar tous les 10 m) pourront y survivre voire s’y développer.

Les caractéristiques physiques et chimiques peuvent varier d’un océan à l’autre mais également en fonction de différents forçages comme les courants horizontaux et verticaux ou l’apport extérieur d’éléments, créant notamment des anomalies chimiques.

L’étude de la colonne d’eau permet donc de comprendre les liens entre les organismes vivants et les paramètres environnementaux, la circulation des masses d’eau à grande échelle et les transferts de matière entre ces mêmes masses d’eau.

Comment étudie-t-on la colonne d’eau ?

La colonne d’eau s’étudie à l’aide de divers instruments océanographiques selon les objectifs recherchés. De manière générale, on réalise des profils verticaux de température, salinité, paramètres chimiques à un point donné sur l’ensemble de la colonne d’eau.

Ces profils verticaux sont souvent réalisés le long d’une section, c’est-à-dire le long d’une ligne tracée à la surface des océans. On obtient alors une vue en 2 dimensions de la distribution des paramètres étudiés.

Les profils sont acquis à l’aide d’une bathysonde, aussi appelée CTD, qui est l’instrument standard des océanographes. Elle est constituée au minimum de capteurs permettant de mesurer la conductivité, la température et la pression (Conductivity, Temperature, Depth en anglais). La conductivité corrigée de la température permet de connaître la salinité de la masse d’eau.

D’autres instruments et capteurs sont souvent associés à la CTD, permettant d’obtenir des données sur l’oxygène dissous, la présence de particules, la fluorescence ou encore les courants. On peut également déployer des capteurs expérimentaux permettant de mesurer en temps réel les métaux traces (le fer par exemple) ou les gaz dissous.

Les bathysondes sont souvent équipées de bouteilles Niskin, disposées en rosette sur un cadre (on parle alors d’une CTD-rosette). Les bouteilles Niskin sont déployées ouvertes en haut et en bas et peuvent être fermées depuis la surface afin d’échantillonner la colonne d’eau à la profondeur voulue sans risque de contamination. Une fois la rosette remontée, les bouteilles sont ouvertes pour récupérer les échantillons et procéder aux analyses chimiques à bord.

Les bathysondes sont généralement descendues et remontées à la vitesse de 1 m/sec. Un profil sur 6 000 m de profondeur peut donc prendre jusqu’à 6 h, échantillonnage inclus.

Grâce aux progrès technologiques des dernières années, de nouveaux véhicules autonomes permettent de réaliser une cartographie chimique et physique de la colonne d’eau en 3 dimensions. Ce sont les AUV (Autonomous Underwater Vehicles), les gliders (planeurs sous-marin) ou encore des bouées dérivantes. Les navires océanographiques peuvent également remorquer des engins équipés de capteurs permettant d’enregistrer tous les paramètres de la colonne d’eau.

Pourquoi étudier la colonne d’eau en Géosciences Marines ?

En Géosciences Marines, nous étudions la colonne d’eau pour deux raisons :

  • Permettre l’exploration et la localisation de nouvelles sorties de fluide ;
  • Étudier l’impact des sorties de fluide sur la chimie de l’eau de mer et les processus mis en jeu.

En exploration, les sorties de fluides (sources hydrothermales ou suintements froids) émettent des panaches qui créent des anomalies chimiques (teneurs en fer, manganèse, méthane par exemple) et physiques (salinité, température, particules) dans la colonne d’eau. L’intensité de ces anomalies dépend de la distance à laquelle se trouve la source. Le but est donc de suivre les anomalies jusqu’à la source en prenant en compte les courants qui conditionnent la dispersion du panache.

Une fois la source localisée et identifiée, l’étude du panache dans la colonne d’eau permet de connaître l’impact sur la chimie de l’eau de mer et sur l’environnement immédiat, de calculer les flux de matière et de chaleur émis par les sources en relation avec les processus géologiques sous-jacents ou encore d’identifier les modes de dispersion des larves des organismes vivant à proximité des sources.