V.- MODELE GEOLOGIQUE D'UN GISEMENT

(Poster 12)

 

Un modèle géologique d'un gisement est une représentation en trois dimensions où est figuré l'ensemble des informations obtenues par les différentes techniques d'exploration. La description des gisements potentiels qui va suivre se réfère exclusivement aux sites situés dans le secteur du Pacifique Nord où la profondeur varie de 4.500 à 5.500 mètres.

V.1.- Les traits majeurs du relief

Le relief est principalement constitué de collines Nord-Sud de 200 à 300 mètres de dénivellation. Elles sont fréquemment dissymétriques; le flanc oriental est plus abrupt que le flanc occidental. Les crêtes de ces collines sont espacées de 2 à 8 kilomètres et peuvent se poursuivre sur plusieurs dizaines de kilomètres.

En plus de ce relief, de larges structures volcaniques à édifices circonscrits de quelques kilomètres de diamètre culminent à plus de 500 mètres au dessus du fond. Les réajustements de la croûte au cours de sa lente dérive vers l'Ouest (quelques centimètres par an) ont entraîné le rejeu d'anciennes fractures provoquant la création de falaises vives.

La sinuosité des contours des courbes de niveaux observées sur la carte Sea-Beam, révèle la complexité du relief de détail, ceci a conduit à l'emploi de méthodes d'observations plus précises et a permis la mise en évidence d'obstacles topographiques jusqu'alors insoupçonnés.
Ces falaises (obstacles topographiques) visitées lors des plongées du "NAUTILE" font apparaître à l'affleurement les formations carbonatées avec, à leur pied, le substratum basaltique. Celles-ci se sont trouvées soumises au pouvoir de dissolution des eaux de fond entraînant la libération de produits insolubles non consolidés, des effondrements locaux et des glissements de terrains.

En général, les sommets des collines, les plateaux intermédiaires et les fonds des vallées sont faiblement pentés. Ils sont séparés par des escarpements (cuestas) marqués de falaises.
Ces falaises ne sont pas détectées par les échosondeurs, même multifaisceaux, qui ne donnent que l'enveloppe de la pente lissée sur plusieurs centaines de mètres.

Les cuestas ne sont pas rectilignes. Le développement de diverses structures d'érosion à leur sommet et sur la pente, les accumulations variables de sédiments à leur pied et les structures "en échelon" de la plupart des failles, réduisent la largeur effective des zones exploitables.

Les fonds océaniques de la zone concernée sont essentiellement constitués par des plages à nodules superposées à une couverture sédimentaire de quelques centaines de mètres reposant sur la croûte océanique basaltique. Différentes sortes d'obstacles, falaises et marches, sont présents.

V.2.- La couverture sédimentaire

Les sédiments sur lesquels reposent les nodules sont des boues non consolidées à très faible résistance mécanique et à forte teneur en eau, composées principalement de débris de radiolaires et d'hydroxydes de fer et de manganèse.

 

En profondeur, ces boues récentes font place à des sédiments un peu mieux consolidés sur 15 à 20 mètres d'épaisseur. Ils sont formés de boues argileuses à radiolaires.

Sous ces sédiments argilo-siliceux, on trouve 60 à 70 mètres de niveaux carbonatés qui se sont déposés sur les basaltes entre 15 à 50 millions d'années.
Ces dépôts carbonatés proviennent de l'accumulation des débris d'organismes planctoniques (algues et protozoaires). A cette époque, une faible profondeur permettait à ces débris d'atteindre le fond sans être dissous par l'acide carbonique en solution dans l'eau de mer.
La profondeur, s'accroissant avec le temps, a atteint une valeur critique (vers 3.500 mètres) dite zone de compensation des carbonates (CCD = Carbonate Compensation Depth) où la forte pression partielle du gaz carbonique en solution entraîne la dissolution de toutes les particules carbonatées.
N'arrivent plus alors sur le fond que les restes d'organismes siliceux (radiolaires, diatomées) et les hydroxydes métalliques insolubles (se trouvant à l'intérieur des carbonates et de la matière organique). Le taux de sédimentation se réduit à quelques millimètres (3 à 10 mm) par millier d'années.

 

Les éléments chimiques libérés au cours de ce processus de dissolution retournent en partie dans l'eau de mer. Le reste se fixe dans de nouvelles espèces minérales, cristallisées in-situ, comme des minéraux argileux, des minéraux silicatés et des nodules et micronodules polymétalliques.

Ces conditions de sédimentation ralentie ont commencé à s'installer très progressivement, à partir du Miocène moyen (10 millions d'années). Seules les boues argileuses riches en radiolaires se sont déposées sur une épaisseur de 25 mètres.

V.3.- Les plages à nodules

Les plages à nodules sont très différenciées. Plus que la composition chimique des nodules, leur granulométrie et leur abondance varient à l'échelle de quelques centaines de mètres par gradient progressif et parfois par changement discret.

 

L'essentiel du stock de minerai potentiel réside dans des plages à 17 - 20 kg/m2; cependant la concentration est de 12 kg/m2 en moyenne sur une pente faible, et diminue à 6-8 kg/m2 sur les pentes supérieures à 8-10 % où les nodules sont fréquement plus petits et moins riches en métaux.

La largeur des plages à nodules varient de 1,2 à 5 km. Les frontières naturelles principales sont en effet constituées par les c™tes. Ces dernières présentent des dénivellations le plus souvent supérieures à la centaine de mètres. Elles contiennent en majorité des pentes fortes et des obstacles naturels.

La longueur des plages à nodules dépasse rarement 10 à 20 kilomètres pour plusieurs raisons: dénivelation excessive par rapport aux possibitités d'adaptation du système minier, rétrécissements préjudiciables à la poursuite de l'exploitation, vastes zones à faible concentration rendant préférable le demi-tour du système d'exploitation.

V.4.- Les obstacles topographiques

Les obstacles naturels susceptibles de gêner la progression des engins de ramassage sont les falaises vives. Elles peuvent atteindre plusieurs dizaines de mètres et se poursuivre en échelon sur plusieurs kilomètres. Elles sont souvent accompagnées à leur pied de blocs éboulés.
Les obstacles isolés susceptibles de se trouver dans les zones exploitables sont :

  • des falaises de quelques décimètres à quelques mètres d'amplitude décelées au SAR dans les zones de pente faible. Elles peuvent être contournées par les engins de ramassage dans la mesure où la trajectoire de ceux-ci peut être dirigée.
  • des fosses subcirculaires d'effondrement apparaissant sur les extrados des collines. Elles proviennent de la dissolution des horizons calcaires. Ces fosses atteignent 10 à 40 mètres de profondeur et plusieurs centaines de mètres de diamètre.
  • des chenaux sinueux à fond plat et à flancs relativement abrupts ont été observés sur les fonds. Ils correspondent vraisemblablement à la présence de courants de turbidité érosifs.
  • des roches volcaniques éparses dont les liens avec la topographie précédente ne sont pas toujours évidents.

 

Ces obstacles constituent une contrainte majeure aux technologies de ramassage. Les données existantes sont encore insuffisantes pour une représentation fiable de leur répartition.

V.5.- Le substratum basaltique

La croûte océanique est composée de basalte. Sa mise en place s'est effectuée le long d'une ride qui s'est éteinte il y a environ 10 millions d'années. Elle est suivie d'une importante fracturation parallèle à l'axe de la ride.
L'expansion océanique implique la formation d'autres fractures (failles transformantes) perpendiculaires à l'axe de la ride. Le long de ces failles se font, par coulissage tangentiel, des réajustements de différence de vitesse d'expansion.
Des volcans sous-marins se sont formés, pour la plupart, à proximité de la ride active. En dérivant ensuite avec la croûte océanique qui les supportent, ils deviennent des éléments marquant du paysage.

V.6.- Conclusion

La connaissance détaillée d'un gisement de nodules polymétalliques (topographie, affleurements, obstacles et plages à nodules) sont nécessaires pour définir une stratégie d'exploitation.