II.- LES NODULES POLYMETALLIQUES

II.1.- Historique de la découverte des nodules polymétalliques

(Poster 1 et 2)

 

Les premières concrétions ferro-manganésifères sous-marines ont été découvertes en 1868 dans la mer de Kara (ex-URSS).

De 1873 à 1876, au cours d'un voyage autour du monde à bord de la frégate océanographique "Challenger", de nombreuses petites boules brunes-noirâtres, riches en Mn et Fe, furent ramassées. On leur attribua le nom de nodules de manganèse. Vers 1900, l'américain Agassiz remonta des nodules dans presque tous les prélèvements effectués dans l'océan Pacifique oriental. Des nodules furent également ramenés dans les carottiers et les dragues des expéditions scientifiques qui se succédèrent dans tous les océans du globe.

Ce n'est qu'à partir de 1957 que l'américain John Méro réussit à convaincre certains industriels de l'intérêt économique que peuvent présenter les nodules et à les entraîner dans l'exploration de l'océan Pacifique central.

Au début des années soixante, les nodules de manganèse commencent à être considérés comme une source possible de nickel, cuivre, cobalt et accessoirement de manganèse.

Les premières sociétés intéressées sont Kennecott et Newport Shipbuilding Company (1962) qui commencent à mener des campagnes d'échantillonnage, alors que des universitaires américains (Fuerstenau, Arrhenius) travaillaient sur la géochimie des nodules et sur leur traitement métallurgique.

A partir de 1965, de nouvelles sociétés ont entrepris à leur tour des recherches dans les domaines de l'exploration, de l'exploitation et du traitement des nodules, parmis ces sociétés AFERNOD.

En 1972, la "National Science Fondation" lance un programme de recherche mobilisant une quinzaine de laboratoires pour étudier l'origine des nodules.

En Union Soviétique, Bezrukov consacre un volumineux ouvrage aux nodules du Pacifique, mais l'exploration industrielle ne débuta qu'en 1982.

II.2.- Distribution des nodules dans les océans

Les travaux scientifiques et industriels entrepris fournissent une idée globale de la répartition des nodules et permettent de localiser les secteurs recélant des gisements potentiels.

Des concrétions ferro-manganésifères ont été trouvées un peu partout sur les fonds marins. La carte éditée en 1969 par Mc Kelvey fait déjà apparaître la présence de nodules dans tous les océans, on en trouve même dans certains lacs (USA, Canada, etc...). Cependant tous ne sont pas d'intérêt économique en raison de la faible abondance des nodules sur le fond et/ou de leur faible teneur en métaux (Mn, Ni, Cu, Co).

 

En 1973, Horn a montré la prédominance de la "ceinture Est-Ouest de la partie Sud du Pacifique Nord", comprise entre les fractures de Clarion et de Clipperton, connue par la suite comme la "Horn zone". C'est dans cette zone que la plupart des groupes miniers ont déjà travaillé.

II.3.- Morphologie

Les nodules polymétalliques se présentent sous la forme de petites boules de couleur brun-noir légèrement aplaties de 5 à 10 centimètres de diamètre reposant sur le fond entre 4.000 et 6.000 mètres de profondeur. Leur masse volumique humide est voisine de 2 g/cm3; leur teneur en eau rapportée à la masse sèche est de 40 % et leur porosité est de 50 %.

 

De taille et de forme très variable (grossièrement sphérique plus ou moins ovoïde), les nodules sont classés en:

  • mononodule: nodule simple sphérique ou ellipsoïdal,
  • polynodule: un seul nodule à plusieurs noyaux,
  • nodule composé: plusieurs nodules soudés.

En section, la plupart des nodules apparaissent formés de couches plus ou moins concentriques appelées "cortex" correspondant aux phases successives de croissance autour d'un "noyau" souvent microscopique pouvant être un débris d'ancien nodule, une dent de requin ou un débris rocheux (basalte, calcaire, etc...).
Les couches sont formées d'hydroxydes de manganèse et de fer plus ou moins cristallisés. Les mieux cristallisées (todorokite, birnessite) sont les plus riches en Mn, Ni et Cu, alors que les structures cryptocristallines (vernadite) sont riches en Fe et Co.

Diverses études ont montré que le Ni et le Cu sont, soit adsorbés aux oxydes de Mn, soit incorporés dans leur réseau cristallin, remplaçant ainsi les sites Mn++ de la todorokite ou de la birnessite.

Les teneurs sont fonction de la cristallisation. Plus les nodules sont bien cristallisés, plus les teneurs sont élevées. Cependant, la récupération des éléments utiles (Ni, Cu) semble plus facile lorsque la cristallisation est incomplète.

La vitesse de croissance des nodules est l'un des phénomènes les plus lents (de l'ordre du centimètre par quelques millions d'années). L'âge des nodules de l'océan Pacifique central est de l'ordre de 2 à 3 millions d'années.

II.4.- Composition chimique

Les analyses chimiques des nodules montrent qu'ils sont constitués de différents éléments chimiques, dont les principaux sont:

  • manganèse (29,40 %);
  • fer (6,00 %);
  • nickel (1,34 %);
  • cuivre (1,25 %);
  • cobalt (0,25 %);
  • titane (0,60 %);
  • aluminium (2,90 %)
  • et sodium, magnésium, silice, zinc, oxygène et hydrogène (32,16 %).

II.5.- Origine des nodules

Le problème de la genèse des nodules est loin d'être résolu. Quatre origines ont été retenues par Bonatti (1986):

  • hydrogénée": lente précipitation des éléments métalliques à partir de l'eau de mer, conduit à des concrétions ayant des teneurs équivalentes en Fe et Mn et une teneur relativement forte en Ni+Cu+Co,
  • "hydrothermale", donnant des concrétions généralement riches en fer, pauvre en Mn et (Ni+Cu+Co),
  • "diagénétique", donnant par remobilisation du manganèse dans la colonne sédimentaire et sa précipitation à l'interface eau-sédiment, des nodules riches en Mn et pauvres en Fe et (Ni+Cu+Co),
  • "halmyrolitique", dans laquelle la source des constituants métalliques est l'attaque des débris basaltiques par l'eau de mer.

Ces théories qualifiées de "minérales" s'opposent à celles dites "biologiques" dont les principaux défenseurs sont Graham et Cooper (1959) pour qui les débris d'organismes seraient responsables des enrichissements en Cu et Ni.

Il est difficile d'opter pour l'une ou l'autre de ces théories. Il semble toutefois que plusieurs processus soient indispensables à la genèse des nodules:

  1. le faible taux de sédimentation laisse aux concrétions ferromanganèsifères la possibilité de croître avant que leur enfouissement ne les séparent des conditions favorables à leurs développement,
  2. les hydroxydes métalliques en provenance de la matière vivante contiennent du cuivre et du nickel pouvant être incorporés aux concrétions manganèsifères,
  3. le manganèse semble provenir du lessivage des basaltes et essentiellement des phénomènes hydrothermaux observés le long des rides médio-océaniques,
  4. le concrétionnement est favorisé par l'activité biologique de certains micro-organismes.

Cependant on connaît aussi de très rapides formations de dépôt de ferro-manganèse autour d'épaves de navires de la première guerre mondiale (Goldberg, 1958) ou de bougies de moteurs (Andrews, 1972).
Cette vitesse impose certaines restrictions quant à l'origine des éléments. En effet, si les nodules se forment lentement, les origines "hydrogénée" ou encore "diagénétique" peuvent être prises en considération. Si au contraire, ils se forment rapidement, il est nécessaire de trouver une source de métaux autre que l'eau de mer, dans ce cas, les origines "hydrothermale" ou peut être "halmyrolitique" ne sont pas à écarter.

II.6.- Conclusion

Les connaissances acquisent jusqu'à présent sur les nodules polymétalliques permettent de classer ceux-ci parmi les minerais d'intérêt économique méritant une attention particulière de la part des sociétés minières.